Aller à la rencontre de l’autre

Par Clément Mao – Takacs, directeur artistique du festival

Un intervalle, en musique, désigne la distance entre deux notes ; mais plus que la distance qui sépare deux points, l’intervalle serait bien plutôt la conscience de cette distance : conscience de l’existence de ces deux points, conscience de leur éloignement plus ou moins grand, conscience de la possibilité de les réunir en les jouant ensemble. De la superposition des intervalles naissent les accords, et des accords, cette science musicale complexe et fascinante au nom inspirant : l’harmonie.

Prendre conscience de l’intervalle, c’est mesurer l’espace entre deux points, mesurer ce qui nous différencie des autres, mais dans une démarche résolument positive : car à travers cet intervalle, on apprend à respecter les différences puis à rechercher ce qui relie, ce qui crée un pont entre les cultures et les êtres humains. L’intervalle ne sépare pas : il pose une distance et invite à passer d’un son à un autre, d’un lieu à un autre, d’une expression à une autre, du connu à l’inconnu. L’intervalle célèbre ce qui est « entre », invite à créer du lien : tout ce festival est conçu à partir de cette volonté de rassembler ce qui peut apparaître à première vue séparé ou disparate.

C’est à ce constat que répond aujourd’hui la création d’un festival à dimension humaine : il se déroule dans des lieux différents des grands temples consacrés, et se veut une invitation à découvrir des espaces ou à les redécouvrir grâce à la musique. Trop souvent, nous n’osons pas pousser des portes, franchir des seuils ; intimidés, nous gardons le silence quand il faudrait, toujours, formuler la/les questions qui nous brûlent les lèvres.

C’est toute l’ambition de ce festival : vous n’y écouterez pas les concerts, mais vous y entendrez – à tous les sens de ce mot lumineux – des propositions artistiques qui se répondent entre elles, interrogent le monde et la société qui nous entourent, essayent de rétablir un dialogue entre artistes et publics. Cet échange, avec ou sans paroles, cette communion dans l’émotion et l’art sont avant tout un don : celui d’un temps de vie partagé et d’une attention soutenue à l’Autre. C’est cet esprit que j’ai essayé d’insuffler au Festival INTERVALLES, et que vous retrouverez chez chacun des artistes programmés.