ÉGLOGUES

Récital flute alto et harpe

PETIT PALAIS – JARDIN
Avenue Winston Churchil, Paris 8

Dimanche 17 Juin | 15H30
Durée : 50′

Musiciens de Secession Orchestra
Récital Julien Vern │ flûte
Vladimir Percevic │ alto
Vincent Buffin │ harpe

En partenariat avec Le Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris

Debussy, Fauré et quelques surprises…

« Il fait de plus en plus clair,
comme l’eau qui se décante, l’air devient limpide,
à croire que nous sommes face à face, ma bien-aimée.
Clarté, clarté, clarté à l’infini. »
Nâzim Hikmet, Il neige dans la nuit

Depuis Virgile, on nomme ainsi un peu confusément tout ce qui est d’atmosphère pastorale, et l’on confond souvent l’églogue avec l’idylle : à première vue, cela respire en effet les joies bucoliques, les plaisirs champêtres, les bergers et bergères amoureu.x.ses. Pourtant, le terme « églogue » ne signifie à l’origine que « recueil ou florilège » : l’églogue est avant tout une somme, un ensemble, une suite de poèmes courts – une collection organisée. Mais sous ses dehors inoffensifs, l’églogue apparaît un contrepoids à des éclats de violence, presque systématiquement dans des moments de tension historiques ou personnelles : ainsi le recueil de Virgile est contemporain de guerres, massacres, prises de pouvoir dans le monde gréco-latin ; la « Sonate » en trio est composée en un mois en pleine Première Guerre Mondiale (1915) par Debussy qui souffre déjà du cancer qui l’emportera trois ans plus tard, et qui la dédie à son épouse Emma avec laquelle les rapports se sont peu à peu dégradés ; et à l’orée des années 30, le poète hongrois d’origine juive Miklós Radnóti sera censuré et subira un procès pour avoir écrit précisément des églogues qui célèbrent un paganisme contrastant trop fortement avec la raideur des régimes autoritaires qui s’établissent alors partout en Europe. De sa prison, Nazim Hikmet écrira des poèmes bouleversants sur le désir de liberté et l’oppression, évoquant l’odeur des bois, le bruit de la pluie et de la neige : poèmes insupportables par la tension extrême qu’ils créent entre la réalité de sa situation et ces images d’un bonheur simple. Qui sait si l’églogue n’est pas la forme vers laquelle les poètes se tournent instinctivement pour échapper à l’horreur du monde qui les entoure, et recréer un monde idéal où les seules guerres sont les joutes amoureuses, où les seules armes des épigrammes, les seules blessures des bouderies entre amants ? Mais si le poète ou le compositeur désire pour un temps échapper à l’enfer quotidien qui le cerne, c’est à nous, spectateurs, auditeurs, de placer cette utopie en regard du monde réel, et de mesurer exactement cet intervalle terrifiant entre la barbarie sanguinaires des hommes et leur capacité à créer une beauté sans limites.